Le Big Data : entre coût et bénéfice environnemental

Environnement et technologie (Source : Pixabay - CC0)
Environnement et technologie (Source : Pixabay - CC0)

La gestion de la production, de la collecte et de l’analyse de mégadonnées, ce que nous appelons communément le Big Data, semble à première vue un concept impalpable, l’affaire de spécialistes au sein d’espaces virtuels inaccessibles. Il n’en est rien, tout du moins pour ce qui est de la production de cette masse de données, devenue si précieuse. Nous contribuons tous à construire le Big Data à partir de nos terminaux informatiques ou de nos objets connectés. Mais avons-nous conscience du coût écologique que celui-ci engendre ou de l’incroyable richesse de ressources que cette avalanche de données offre aux analystes, spécialistes de la donnée environnementale ?

La face cachée du Big data

Résultats de l'enquête sur l'industrie du SEO - 2012 (Auteur: http://www.designinfographics.com / Source : https://searchenginewatch.com/sew/study/2200182/2012-seo-industry-survey-results-share-salaries-tools-tactics-more)
Résultats de l’enquête sur l’industrie du SEO – 2012 (Auteur: http://www.designinfographics.com / Source : https://searchenginewatch.com/sew/study/2200182/2012-seo-industry-survey-results-share-salaries-tools-tactics-more)

Serions-nous capables de nous passer de nos mails, de nos réseaux sociaux, des consultations de nos données (hébergées sur un cloud ou consultables via une base de données en ligne), depuis notre ordinateur portable, mais plus probablement davantage depuis notre tablette ou smartphone ? Trouvons nous acceptable aujourd’hui que l’accès à ces données soit suspendu, ne serait-ce que quelques heures ? Est-il concevable que l’ensemble de ces données ne soient pas disponibles 24h sur 24, 7 jours sur 7?
La réponse est non, nous n’avons pas l’intention de nous passer de nos data, les géants du web (Google, Amazon, Facebook, Apple,…) l’ont bien compris et mettent d’ailleurs tout en œuvre pour répondre à cette demande croissante et d’une exigence grandissante.
Les entreprises, les administrations, les établissements publics sont également d’importants producteurs de données et ont subséquemment un besoin élevé de stoc
kage des données, avec une exigence accrue en termes de sécurisation et d’accès à ces données en continu.

 

La diffusion et le stockage des données : espaces virtuels ou bien réels ?


La plupart d’entre nous avons conscience que la circulation des données ne s’opère pas dans les méandres plus ou moins virtuels de la sphère internet. Pour atteindre leur destinataire ou leur espace de stockage, ces données transitent via des infrastructures physiques (câblages, gaines,…) et sont entreposées sur des serveurs de manière temporaire ou sur du plus long terme.
Mais mesure-t-on réellement le véritable impact environnemental, bien réel, de cette explosion et cette circulation des données numériques, dont le volume double désormais tous les 2 ans. Le volume colossal de données que nous produisons quotidiennement (environ 2.5 trillions de données) nécessite en effet la construction de véritables fabriques du numérique, en d’autres termes de vastes entrepôts hébergeant des centaines, voire des milliers de serveurs par lesquels transitent ou sont stockées nos données numériques.

 

Data center de Google

Google datacenter (Source : https://www.google.com/about/datacenters/gallery/#/)
Google datacenter (Source : https://www.google.com/about/datacenters/gallery/#/)

Ces centres de données, conçus pour être opérationnels en continu, sont extrêmement énergivores, tant pour ce qui concerne  leur fonctionnement que pour la régulation de la température générée par toutes ces machines. Les mails envoyés chaque jour sur la planète se comptent en centaine de milliards, ce sont en effet 204 milliards de mails qui ont été envoyés dans le monde chaque jour en 2015[1]. Rapporté à une entreprise de 100 personnes, cela génère une émission de 13,6 tonnes équivalent CO2 par an, soit l’équivalent, en termes de pollution, de près de 14 allers retours en avion entre Paris et New York, selon l’Ademe.
Ces chiffres parlent d’eux-mêmes et permettent de comprendre les enjeux qui pèsent sur la circulation des données numériques. Ce que redoutent par-dessus tout les fournisseurs d’accès, c’est le crash numérique.
Pour éviter cela, tous les moyens sont mis en œuvre pour ne laisser aucune place à quelque dysfonctionnement que ce soit, comprenant par exemple la redondance des équipements, l’installation des centres de traitement des données proche des sources de production électrique.

« A l’échelle européenne, la Commission, qui estimait cette consommation à 56 milliards de kilowatts en 2008, table sur 104 milliards en 2020. » [2]

Un rapport de Greenpeace, « Votre cloud est-il net ? »[3] insiste sur le fait que les entreprises américaines, proposant des services de Cloud computing, doivent veiller non seulement à la réduction de leur consommation énergétique, mais aussi au mode de production de cette énergie. En effet, encore trop de géants américains du web sont installés en majorité en Caroline du Nord, proche des centrales électriques au charbon, lesquelles puisent ce minerai en défigurant les paysages environnants. La production d’énergie fossile participe au réchauffement climatique, à la production de gaz à effets de serre : notre utilisation du web, nos actions quotidiennes liées à la production et la diffusion de données ont un impact direct sur la planète.

« Ce que redoutent par dessus tout les fournisseurs d’accès, c’est le crash numérique »
« Entrepôt, fabrique : le vocabulaire du champ industriel croise celui du numérique… »

« Le réseau de production énergétique devient intelligent pour une approche collaborative et solidaire »

Comment appliquer l’efficacité énergétique à la révolution numérique ?

Pour des raisons économiques, mais aussi pour des raisons d’impact environnemental, les entreprises du web ont pris conscience cependant qu’il était urgent de se tourner vers les énergies renouvelables pour faire face à ces besoins énergétiques exponentiels.
La course au renouvelable parmi les entreprises du web est lancée. Google et Yahoo développent progressivement les énergies propres pour l’alimentation de leurs data centers. Facebook montre également l’exemple. Le leader des réseaux sociaux a en effet installé l’un de ses data center en Suède afin de bénéficier du climat favorable au refroidissement naturel de ses équipements. Apple a mis en place des fermes solaires destinées à alimenter ses centres de traitement des données. Certaines entreprises, en Europe également, recyclent la chaleur produite par leurs serveurs et la proposent pour le chauffage de bureaux. Ces quelques exemples, au-delà de l’effet Greenwashing recherché par les entreprises, contribuent à la prise en considération du coût environnemental des pratiques liées au net.
Ces entreprises informatiques portent une responsabilité environnementale évidente, mais les utilisateurs de ces technologies n’ont-ils pas aussi un rôle à jouer pour ralentir cette course effrénée vers toujours plus d’accès, toujours plus rapide et continuellement disponible ?
L’Ademe propose des guides à destination des usagers du web pour sensibiliser les professionnels et les particuliers aux coûts environnementaux des actions de chacun sur internet. Il est sans doute temps de se poser la question de l’intérêt de conserver certaines données ad vitam aeternam sur des serveurs énergivores alors que ces données ne seront plus jamais consultées. La question du tri et de la conservation des données est cruciale dans ce contexte également. Un accès sans interruption à toutes les données sans exception est-il absolument indispensable ?
Toutes ces questions émergent progressivement. Nous vivons désormais à l’ère du numérique, pour le pire mais sans doute aussi pour le meilleur…

NOTES——————————————–

[1] http://www.planetoscope.com/Inte rnet-/1024-emails-envoyes-dans-lemonde.html
[2] http://www.lemonde.fr/planete/article/2013/07/01/les-centres-dedonnees-informatiques-grosconsommateurs-denergie_3439768_3244.html#C7I6sJ EMSywWeUVX.99
[3]https://cdn.greenpeace.fr/site/uploads/2017/02/votre-cloud-est-ilnet.pdf?_ga=1.19140408.1021068756.1491025039

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